Proche-Orient: nouveau pilonnage de Gaza par Israël, plus de 200 morts en une semaine

Malgré les appels à la désescalade, les affrontements se poursuivent au septième jour depuis le regain de tensions entre Israël et la Hamas.

 

Durant la nuit de dimanche à lundi, comme depuis une semaine, les bombardements intensifs israéliens ont secoué la bande de Gaza. L’aviation israélienne a pilonné la bande de Gaza à des dizaines de reprises en l’espace de quelques minutes, provoquant des coupures de courant. Des centaines de bâtiments ont été endommagés, d’après les autorités locales, qui n’ont pas fait état de victimes dans l’immédiat. Tsahal justifie ces frappes en expliquant viser « des cibles terroristes » sans donner plus de détails.

Les maisons de neuf responsables du Hamas ont été attaquées par des avions et des drones. De même que l’une des entrées du réseau de tunnels creusés par le Hamas, surnommé le « métro de Gaza », devenue la cible d’attaques aériennes à répétition, rapporte notre correspondant à Jérusalem, Christian Brunel.

Autrement dit, l’heure des négociations pour un cessez-le-feu n’a pas encore sonné. Mais sur le front diplomatique, le Premier ministre a dit qu’il commençait à y avoir des pressions, une allusion au changement de ton des États-Unis. Antony Blinken, le secrétaire d’État américain, a proclamé sur Twitter : « Il faut que les violences s’arrêtent immédiatement ! »

Il a pris contact avec l’Arabie saoudite, le Qatar, l’Égypte, qui pourraient servir d’intermédiaires. Sur place, l’envoyé spécial de l’ONU a ouvert un canal de discussions avec le conseiller à la sécurité nationale de Benyamin Netanyahu.

« J’ai eu l’impression de mourir »

Dans les Territoires palestiniens, c’est la stupeur. « Il n’y a jamais eu de frappes d’une telle ampleur », a témoigné Mad Abed Rabbo, 39 ans, qui vit dans l’ouest de la ville de Gaza. « J’ai eu l’impression de mourir », a déclaré une autre habitante avant d’ajouter : « Netanyahu doit se rendre compte que nous sommes des civils, pas des militaires. »

Alia Abu Amr a vécu toute sa vie à Gaza. Mais pour elle, ces dernières nuits de bombardements ont été les plus destructrices jamais connues : « En une semaine, les raids israéliens ont fait plus de dégâts que durant les cinquante jours de la guerre de 2014. On a pu avoir jusqu’à trente frappes par minute. Et je ne parle que des bombardements aériens. Il y a aussi les tirs d’artillerie ».

« Les enfants sont terrifiés. Que Dieu nous vienne en aide… Ils nous ont brisés. Mais on essaye de faire bonne figure devant les petits, pour ne pas les effrayer davantage », raconte, au micro de notre correspondant Sami Boukhelifa, cette mère de famille terrée chez elle avec ses proches, comme les deux millions de Gazaouis, qui vivent sous blocus israélien depuis 15 ans. À Gaza, les civils n’ont nulle part où s’abriter.

Selon les habitants de Gaza, lors de la guerre de 2014, l’armée israélienne n’a ciblé les tours de la ville que durant les derniers jours du conflit. Cette fois-ci, dès le début, l’État hébreu a pulvérisé plusieurs de ces grands immeubles d’habitation. Selon l’armée, le Hamas dissimulait dans ces bâtiments ses activités terroristes.

« À Gaza, il y a une densité de population très élevée. Donc, dans toute frappe, il y a toujours un risque de toucher des personnes qui vivent à proximité de la cible visée. Et aujourd’hui, dans la situation, on ne peut pas déterminer si une cible est, ou pas, un objectif militaire légitime », explique à RFI Fabrizio Carboni, directeur Moyen-Orient du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).

La Croix-Rouge demande donc de restreindre « au minimum » les frappes étant donné la configuration de la bande de Gaza et « de rester à distance des civils ». « C’est sous les yeux de tout le monde qu’il y a un enjeu, une grosse difficulté pour la population, dans un environnement comme Gaza », ajoute Fabrizio Carboni.

« Attaques indiscriminées contre la population civile »

Depuis lundi, plus de 3 000 roquettes ont été tirées par le Hamas en direction d’Israël, le rythme le plus élevé de projectiles jamais lancés sur le sol israélien, a indiqué dimanche l’armée israélienne.

Au total, depuis le 10 mai, 197 Palestiniens ont été tués, dont au moins 58 enfants, et plus de 1 200 blessés. Côté israélien, 10 personnes ont été tuées dont un enfant, et 282 blessées après des tirs de groupes armés palestiniens depuis Gaza.

Face à un bilan que ne cesse de croître, les organisations tentent de faire respecter le droit humanitaire, mais avec difficulté dans une situation telle que celle-ci. « C’est un environnement extrêmement polarisé, extrêmement médiatisé, extrêmement politisé… Et pour une organisation comme la nôtre, qui veut essayer de se retrouver dans un espace de neutralité humanitaire, c’est extrêmement difficile d’avoir une parole publique, parce qu’inévitablement on va être pris à partie », détaille le directeur Moyen-Orient du CICR.

Le positionnement actuel de l’organisation humanitaire est de discuter « de manière confidentielle avec les parties » pour arrêter les « attaques indiscriminées contre la population civile ».

Sur son territoire, Israël est également confronté à des violences inédites et des menaces de lynchages dans ses villes « mixtes », où vivent Juifs et Arabes israéliens, un terme contesté par les Palestiniens qui préfèrent « citoyens palestiniens d’Israël ». Et ces affrontements entre pro-Palestiniens et pro-Israéliens s’étendent à d’autres pays.

Pour nous c’est notre terre, on ne va pas s’arrêter.

Au Canada, des heurts ont éclaté entre les deux camps lors de rassemblements à Montréal. La police a dû faire usage de gaz lacrymogènes pour mettre fin à ces échauffourées.

Des violences que le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a condamné ce dimanche en insistant sur « le droit de se réunir pacifiquement et de s’exprimer librement au Canada ». Et d’insister sur le fait qu’il n’était pas question de tolérer « l’antisémitisme, l’islamophobie et la haine ».

À Bruxelles également, des rassemblements ont eu lieu. Plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées dimanche après-midi en soutien à Israël, rapporte notre correspondant Jérémy Audouard.

Tous mes amis sont là-bas, à Ashdod, à Tel-Aviv… Et cette nuit, ils ne dormaient pas, ils étaient dans la cage d’escalier. C’est atroce ! C’est très, très dur ! Très dur à vivre.