Pointe Sarène en panne : Sénégal, une République sans avion présidentiel ( Enquête )

Les Sénégalais, animés de bonne foi refusent de cautionner la non mise en disposition d’un avion présidentiel au service du Chef de l’Etat, Macky Sall. Ne serait-ce que pour des raisons de sécurité afin d’effectuer sa mission avec efficacité et dans les délais. Ces derniers temps, le Président Sall voyage de manière régulière avec des avions en location. Une situation cauchemardesque aux conséquences multiples.

Le Président de la République, Macky Sall n’a plus d’avion. La pointe de Sarène (6VONE) est cloué au sol depuis le 18 février 2020, date de son dernier vol officiel. Depuis lors, les seuls vols effectués l’ont été pour des tests d’une trentaine de minutes. Les tests effectués les 20, 22 et 26 octobre 2020 n’étaient pas concluants. Et son plus long voyage, découvre-t-on, l’a été pour le 27 octobre avec 2 heures de vol. D’après le site lfmpnews visité, l’Etat du Sénégal, conscient du danger ou des risques, a tout simplement demandé la désactivation du suivi de l’appareil.

Seulement, Macky Sall aurait peur de la perception des Sénégalais, concernant l’achat d’un nouvel appareil présidentiel. Conscient de la capacité de manipulation de certains citoyens sénégalais, il aurait préféré faire avec les moyens du bord.

Mais, face aux urgences de l’heure et obligations de rendre service au pays, rien, précise-t-on, ne devrait l’empêcher de voyager dans les meilleures conditions de sécurité. Rien ne justifie aussi, sa méfiance… Outre sa peur de voyager en toute insécurité, rien d’autre… ne devrait l’empêcher de faire ses déplacements avec les membres de son gouvernement, d’être à bord d’un avion en bon état.

Alors, les administrés doivent refuser cette honte, découlant de ce manque d’avion présidentiel pour un Etat souverain qui aspire à un leadership continental. Il est temps aujourd’hui, pour Macky Sall de faire face à cette situation qui n’est pas du tout, une provocation aux spécialistes des critiques infertiles. Un avion présidentiel de qualité avec toutes ses commodités est une nécessité pour un Etat responsable. C’est moins cher et, il va servir dans le long terme.

Constat…, stocké depuis plus de trois mois dans le jargon aérien signifie un stationnement long terme. Inutilisable en l’état. Mais, ayant encore un « potentiel de vol ».

Ainsi, le Sénégal avait racheté l’Airbus A319 CJ, un avion moyen courrier à la France au mois de mars 2011. Ledit avion est entré en service au mois d’avril 2002.

Près de 20 ans après, l’absence d’avion présidentiel revient en force. C’est une honte et un drame pour la République du Sénégal. Constat déplorable. A date récente, Macky Sall rentrait au Sénégal sans l’avion de commandement. Il revenait un dimanche du mois de septembre d’un sommet de la Cedeao.

Après un crochet sur Ouagadougou, l’appareil de son homologue nigérien l’a ramené sur Dakar. En septembre 2019, c’est à dire, moins d’un trimestre plus tôt, ‘‘Pointe Sarène’’, surnom de l’Airbus présidentiel sénégalais, avait également était immobilisée pour révision, après que le chef de l’Etat est rentré du Congo par un autre Airbus. A priori, une révision sans grand résultat.

« A son retour, il y avait toujours problème. L’avion avait une panne. Et, il n’était pas disponible. C’est pourquoi, il n’a pas pu porter le Président Sall lors de son dernier déplacement. Il est encore en révision », regrette-t-on. ‘’Pointe Sarène’’ refait des siennes et les dernières tribulations dans le domaine de la navigation aérienne, comme l’accrochage entre le Falcon présidentiel français et l’appareil sénégalais à l’aérodrome de Saint-Louis et le crash d’un avion médicalisé en septembre 2015, fatal à sept personnes.

Ailleurs, Al Hassane Hane, le technicien avionique supérieur, accroché et qui avait lancé l’alerte avant ce crash aérien mortel, explique que pour l’option à adopter, tout dépend de la nature de la panne. ‘‘C’est la cellule qui pose le plus de problème dans la révision d’un avion. Si, c’est le moteur qui a des problèmes, on l’enlève et on remet un de neuf. Si le système intérieur est défaillant, tout le système peut être changé. Mais s’il s’agit d’une cellule défaillante, là c’est très sérieux. Il vaudrait même rebuter l’avion. Les gens ont essayé de voir, mais…’’, a-t-il expliqué.

Le Technicien avionique supérieur explique, c’est quoi la Cellule. « Un avion n’est pas comme un véhicule. Avant tout, c’est la cellule, c’est-à-dire l’ossature et le revêtement. Ce qu’on voit quand il vole, la silhouette, c’est ce qui est important. Le fuselage, les ailes, les empennages, etc. Tout le reste, comme les moteurs, les aménagements et équipements qui sont rapportés… Ils marchent, tant mieux. S’ils ne marchent pas, on les enlève et on les change », retient-il.

Selon l’expert, le potentiel d’un appareil, c’est à dire, sa durée de vie est relatif. Le principe, insiste-t-il, en est que si la navigation est supportable pour la cellule, l’appareil est certifié. « On peut avoir un appareil tout neuf, en proie à d’énormes intempéries qui ne vivra pas longtemps. Un avion très bien suivi peut aller au-delà des espérances. Ce sont des cycles de potentiel qui sont définis par le constructeur qu’il faut respecter », dit-il.

Les Sénégalais doivent aussi, savoir que ‘‘Pointe Sarène’’ a juste, changé d’appellation. Sous le régime du Président Abdoulaye Wade, l’avion portait le nom de « Pointe de Sangomar ». C’est un Airbus A319, acquis officiellement en 2011. Doté de 30 places et acheté à 20,9 milliards de FCfa, l’avion était vieux de huit ans. Son prix unitaire, révèle-t-on, peut avoisiner les 60 milliards de FCfa. Et, il a été acheminé à Perpignan et ‘‘réadapté’’ aux goûts du président Wade. « Pointe Sarène » a servi dans le passé d’avion de commandement à l’armée française pour le déplacement des présidents français. Son acquisition s’est faite après une révision générale.

D’après le technicien avionique, cet appareil est loin d’être le nec le plus ultra de la compagnie Airbus. Sur ce point précis, l’expert disqualifie l’argument de la longévité, évoqué par Seydou Guèye. « L’âge d’un avion est extrêmement relatif. Un avion est programmé pour faire un système de calcul de vie calendaire ou horaire. On fixe un certain nombre de semaines, de mois, d’années. Et, à chaque butée calendaire ou horaire, l’avion doit effectuer une révision générale. Lors des visites, l’avion est scruté de fond en comble.

Des spécialistes sont là surtout pour la cellule, dont se chargent les éléments de la Ndi qui inspectent l’état même de la cellule. Quand l’avion arrive, les moteurs sont enlevés et envoyés à l’unité de production pour la révision. Ce sont les spécialistes moteurs qui s’en occuperont et les spécialistes cellule s’occupent de la cellule », précise-t-il.

Sous ce registre, un des membres de l’opposition, ancien chef du gouvernement, Abdoul Mbaye, semble être du même avis. « L’avion présidentiel inquiète. Il n’est pourtant pas vieux. Il n’a que 20 ans. Celui de Donald Trump en a 30 ans. Il suffit de faire la révision adéquate », a-t-il posté sur sa page Facebook. Les Etats-Unis, évoqués prévoient toutefois, d’acquérir deux autres « Air Force One » en 2024. En principe, l’A319 exige une révision tous les 5 à 6 ans, fait savoir le technicien avionique, avec des prolongations qui peuvent être accordées par le constructeur avec l’obligation d’aller en révision générale à l’issue.

Révision profonde, une option plus profitable

L’Etat du Sénégal est en face d’un besoin pressant. Vu les enjeux du moment, il est dans une situation qui ne peut plus attendre. Suivant les circonstances, la solution la plus pragmatique, face aux pannes à répétition de « Pointe Sarène », combinées aux déplacements fréquents de Macky Sall, il serait très difficile d’arbitrer.

Etant dans un contexte de resserrement où l’orthodoxie est même allée jusqu’à imposer un budget-programme aux différents Ministères pour le projet de loi de finances 2020, l’Etat du Sénégal pourrait-il, se permettre pareille acquisition ? s’interroge Abdoul Mbaye sur son page Facebook.

Mais, le technicien Al Hassane Hane estime que face aux urgences sociales et les nouvelles orientations budgétaires, l’option d’une révision profonde et sérieuse reste la plus profitable. « Le Sénégal vit des heures extrêmement difficiles. L’acquisition d’un nouvel appareil n’est pas une priorité pour l’Etat. Si cet appareil peut être structurellement révisé, remis à neuf, autant le faire et s’épargner des frais d’acquisition, formation de personnel et autres », conseille-t-il.

Ce choix de faire réviser l’Airbus, seules les opérations de premier échelon peuvent s’effectuer localement. Les visites majeures supposent d’envoyer l’appareil en unité de révision chez des firmes qui ont la licence pour intervenir sur les pannes. Ce qui ne sera pas sans répercussion sur le budget.

Sous Wade, l’appareil avait à ses premières heures, un équipage composé de Français pour l’essentiel, pris en charge financièrement par l’Etat français jusqu’à la fin du transfert de compétences de leurs collègues sénégalais.

Présentement, la réparation (ou éventuellement un nouvel achat) suivrait également la même procédure de mise à jour du personnel navigant technique sénégalais. « Après révision, le pilote et les mécaniciens sont aussi, mis à l’épreuve. Il y a des vols de contrôle, d’autres vols pour voir si l’avion est navigable avant la livraison’’, explique M. Hane. « Une réparation à moins de frais à laquelle le technicien suggère l’acquisition, différée, d’un petit jet dans le parc présidentiel pour pallier ces genres de manquements et pour les déplacements express », a relevé l’expert.

Sur ce, des interrogations d’une opinion ne devrait pas être plus avancée sur les montants à décaisser pour révision ou nouvelle acquisition. En principe, les coûts budgétaires sont supportés par l’armée, dont les fonds ne sont pas soumis à la plénière de l’Assemblée, lors du vote des lois de finances. Le secret qui entoure la vraie nature de la panne s’explique aussi, par le caractère sensible d’une telle information jalousement gardée par le commandement.

Et pourtant en Chine, suite à 27 défauts découverts dans le Boeing que le président Jiang Zemin avait commandé chez Delta, le président chinois ne dispose officiellement plus d’un avion personnel depuis 2000. C’est à bord des appareils de la compagnie nationale Air China que Xi Jinping se déplace.

Pour Macky Sall, une piste de la préférence nationale n’est pas à exclure. L’équation demeure irrésolue et M. Hane s’en impatiente, tout en exhortant à faire vite pour bien régler ce problème.

La rédaction de leral…