En décidant d’allouer aux chefs de village une indemnité de 50 mille, Macky est dans une logique de campagne visant un troisième mandat, comme c’était le cas avec Wade. Ce dernier avait offert aux chefs de village des véhicules que Macky avait par la suite récupérés.
Contre toute attente, Macky Sall a décidé d’octroyer, à partir du mois de juillet, 50 mille francs Cfa par mois à chaque chef de village. «Il s’agit des villages officiels qui ont fait l’objet de reconnaissance administrative. Et je rappelle que c’est le préfet de département qui prend un arrêté qui est approuvé par le ministre de l’Intérieur pour que le chef de village ait une reconnaissance officielle. Nous avons décidé, à partir du mois de juillet, d’octroyer une indemnité mensuelle de 50 mille frs Cfa aux chefs de village afin de les accompagner dans leurs tâches énormes d’assistance de l’Etat», dit-il, lors d’un Conseil présidentiel de développement à Matam.
Mais cette décision sonne comme une volonté politique de reconquête des élus locaux, en perspective des élections territoriales, législatives et la présidentielle de 2024. Car Macky Sall ne fait plus mystère de briguer un troisième mandat. En décidant d’octroyer des indemnités aux chefs de village, il singe son prédécesseur et ancien mentor. En effet, à la veille de la présidentielle de 2012, alors que le débat sur la légalité de sa troisième candidature faisait rage, le président Wade avait alloué des indemnités et des véhicules de fonction aux chefs de village. Cette décision avait grevé, à l’époque, le budget national, et ne lui avait pas permis de remporter l’élection présidentielle de 2012.
Ironie de l’histoire, Macky Sall qui voulait visiblement en découdre avec son prédécesseur, à son accession à la magistrature suprême, avait arraché de manière spectaculaire ces véhicules aux chefs de village.
Mais quoi qu’il en soit cette décision est fortement critiquée par l’opposition. «Cette décision est sans nul doute l’une des plus désastreuses du gouvernement actuel au triple point de vue financier, social et politique»,dénonce Abdoulaye Niane de la coalition Jotna. Financièrement, ajoutent Bruno d’Erneville et Cie, «le budget sera perturbé avec les nombreux villages du Sénégal. Des milliers de villages donc des milliards à payer. De simples concessions vont même s’ériger en villages au vu de l’intéressement proposé. Ceci amènera forcément un réveil des querelles partisanes et sociologiques. L’affaiblissement du tissu social. Les villages gagnés par l’opposition risquent de ne pas être servis. D’où le chantage politique qui se cache derrière cette mesure clientéliste, inopportune et historiquement décalée. Le régime Wade avait bien envisagé cette initiative avant de reculer. La politique politicienne ne pouvait pas tout se permettre».
Magib GAYE