« Entre Macky Sall et moi, c’est fini« . C’est en ces termes que Aliou Sow a annoncé sa rupture avec le président Macky Sall. Dans une interview accordée à nos confrères de L’Observateur, l’ancien ministre de la Décentralisation et des Collectivités locales sous le régime de Abdoulaye Wade, dénonce ce qu’il appelle « la patrimonialisation de l’Etat et des institutions de la République » et les « atermoiements » de Macky Sall « autour d’un troisième mandat ». Mais, le leader du Mouvement des Patriotes pour le développement (Mpd Liggeey) n’a pas dit toute la vérité dans cette histoire. Car, son discours cache mal la frustration d’un homme qui n’a pas pu obtenir ce qu’il voulait. En effet, Guestuinfo a appris de sources dignes de foi que Aliou Sow espérait un poste ministériel après son soutien au candidat Macky Sall à la présidentielle de 2019.
Mais son espoir a été brisé par le président de la République qui l’a préféré à Oumar Sarr, son ennemi juré. D’ailleurs, le désamour entre les deux hommes et qui découle d’une affaire privée est un secret de Polichinelle. « Je n’ai jamais rencontré un homme aussi mauvais qu’Oumar Sarr. Il a détruit l’œuvre qui m’était chère que j’ai eue à construire en tant que jeune. Je vis dignement ma solitude du vaincu. » , avait confié Aliou Sow dans les colonnes de L’Observateur en 2012. Avant d’ajouter : « En ce qui me concerne, il est clair que ma loyauté à Abdoulaye Wade ne me fera pas accepter d’être derrière Oumar Sarr. Je ne le ferai pas. C’est exclu, pour des raisons objectives et subjectives. Je n’ai jamais rencontré dans ma vie un homme aussi mauvais, aussi indécent, aussi immoral, pour ne pas dire amoral, qu’Oumar Sarr. Il fait partie de ces rares espèces en disparition, en termes de moralité et de valeurs ».
Donc, le fait de nommer l’ancien coordonnateur du PDS dans le gouvernement est considéré par le leader du mouvement Mpd Liggeey comme un « affront ». Une frustration exacerbée par la nomination de Modou Diagne Fada à la Direction générale de la SONACOS. Celui qui fut son mentor au Parti démocratique sénégalais avant de devenir son adversaire politique.
Tonneau vide
Mais du côté du pouvoir, on minimise cette sortie médiatique de Aliou Sow et l’assimile à un tonneau vide. « Aliou Sow ne représente rien du tout politiquement. Il ne peut même pas être maire dans son fief à Keur Pathé (Kafrrine). Malgré tout, Macky Sall a fait de lui un vice-président au niveau du Haut conseil des collectivités territoriales avec un salaire de ministre», nous a confié un responsable de la majorité présidentielle.
S’agissant de la question du 3e mandat de Macky Sall, certains de ses collègues au niveau du HCCT pensent que Aliou Sow en parle sans conviction. Ils l’accusent de faire preuve de duplicité. « Il(Aliou Sow) déclare publiquement que Macky Sall est à son dernier mandat, alors qu’en coulisses, il soutient le contraire et théorise le 3e mandat« , souffle un membre du HCCT.
Quand Aliou Sow tressait des lauriers à Macky Sall
Mais pour bien cerner le personnage de Aliou Sow, il faut remonter à 2008 au début de la descente aux enfers de Macky Sall, président de l’Assemblée nationale. Alors que le PDS était divisé entre pro et anti-projet de d’évolution monarchique, Aliou Sow s’était opposé à Karim Wade et à sa « Génération du concret » avant de tourner casaque. Reniant ses principes, l’ancien ministre s’érigera par la suite à bouclier du fils de Wade. Jugé par certains comme un » homme suffisant » et « prétentieux« , « Docteur » Aliou Sow, comme il aime à se présenter, s’était même permis de convoquer Macky Sall, alors maire de Fatick, à son ministère pour audition dans la cadre d’un projet de développement local. Mais Macky avait refusé de répondre à cette convocation qui, selon lui, était une « tentative d’humiliation » à son encontre. En 2012, avec l’élection de Macky Sall à la Présidence de la République, le leader de Mpd Leeguey, a tenté de se racheter. Après avoir transhumé vers la majorité présidentielle, Aliou Sow a sorti un ouvrage intitulé « Courage d’agir » aux allures d’un gage. Dans ce livre, l’auteur y fait une comparaison de style entre Idrissa Seck et Macky Sall. « Même si Idy est intelligent ou rusé, comme le pensent beaucoup, sa propension à tout voir, tout prendre et tout de suite était devenue trop flagrante, voire provocante et maladroite. Sa gourmandise et son empressement risquent de le perdre pour de bon. S’il reconsidère sa démarche politique en apprenant à être plus constant dans ses convictions et plus fiable dans la gestion de ses alliances, il pourra tout rattraper dans sa carrière politique. « , a écrit Aliou Sow.
Pour avoir pratiqué les deux hommes, l’ancien ministre croise leurs portraits: « Aujourd’hui, Macky l’a largement dépassé dans l’estime des Sénégalais car « Niangal » sait au moins tourner une page pour en ouvrir une nouvelle sans verser dans le jeu de chantage puéril ou les calomnies inutiles. Macky est un homme d’équipe, Idy est un solitaire qui décide seul. Macky pense souvent à lui d’abord mais il décide en équipe. Idy affirme de façon très prononcée son autorité sur ses collaborateurs alors que Macky subit beaucoup l’influence de son entourage. Dans la gestion des affaires de l’Etat, Macky implique sa famille, Idy impose ses copains. Idy défend et protège ses amis, Macky s’occupe de sa personne et ne prend jamais de coups à leur place ou pour leur défense. Idy est incapable de cacher sa colère alors que Macky sait bien dissimuler la sienne dans l’attente d’une opportunité plus propice pour donner le coup fatal »